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Corps, langage et art-thérapie dans le cadre des addictions



Le terme d'addiction peut regrouper plusieurs conduites : l'alcoolisme, les troubles du comportement alimentaire (boulimie, anorexie), la toxicomanie, le jeu, troubles des conduites sexuelles, une dépendance qui entraîne la répétition « à corps perdu »… Michel Serre fouille l'étymologie du mot addicere : dire, céder, vouer, vendre, condamner. Nous sommes par la force des choses addicte au langage, drogué de langue, adonné au dit.

L'étymologie du mot vu ainsi renvoie à la force du dire et à la condamnation d'y être asservi comme condition de n'avoir que cela pour pouvoir être et survivre en ce monde.

Une recherche qui nous renvoie également au parlêtre de Lacan comme le traumatisme provoqué par l'insuffisance du langage à représenter, à transmettre l'expérience, celle de tout dire en général.

Décortiquer le mot addiction peut faire prendre conscience de sa force tant celle ou celui qui ne dispose pas du langage d'une manière ou d'une autre, se trouve finalement à la fois asservi au langage tout en y étant exclu, on comprends le traumatisme. Alors, comment dire simplement ou comment dire l'indicible, l'insoutenable lorsque cette souffrance là n'est pas entendue ?

On comprends alors tout le bien fondé des divers autres moyens d'expressions artistiques ou pas.


Une théorisation qui articule le dire et le dit, du corps et de l'acte.

L'articulation du corps et du langage où le corps devient le support du dire, et l'acte, toute la consistance du dit. Dans l'addiction c'est bien l'acte qui prend le dessus sur toute tentative d'élaboration mentale comme tentative de fuite à autre chose notamment de la souffrance qu'elle pourrait générer. Comme une résistance, un refus, ou peut-être la peur de la dimension psychique. C'est dans « Malaise et civilisation » que Freud considère les stupéfiants en tant que « briseurs de soucis ».

La conduite addictive provoque une forme de soulagement illusoire temporaire de la souffrance, l'impression peut-être de la disparition de l'insupportable, ou l’impression de correspondre à ce que l’on voudrait être. La dépendance de l’individu addictif ne proviendrait-elle pas d'un décalage entre le sujet et son moi ? Lieu de toutes les identifications asservissantes depuis toujours… et au langage. Comme annulation de ce que le fonctionnement psychique doit à l’Autre.

La conduite addictive comme langage du corps, articule langage et corps dans un besoin de trouver à tout prix un lieu pour se dire.

L'art-thérapie est alors tout indiquée pour aider à déplacer un indicible sur un autre support que le corps et de lui permettre de se dire autrement que par l'acte. L'art-thérapie a cet avantage de pouvoir donner la possibilité à la fois de trouver un support moyen d'expression, puis ensuite de pouvoir, par son biais, symboliser, exprimer, autrement que par l'acte, ce qui n'était jamais advenu : le corps et l'acte, le dire et le dit, le message et son contenu, le dispositif créatif et ce qu'il permettra d'expression au sein de la relation thérapeute et patient.


L'art-thérapie comme substitut à l'addiction : réinjecter du désir pour évacuer l'addiction

Après quelques séances, M. V. parvient à surmonter sa toxicomanie ; les comportements répétitifs sont remplacés par une élaboration créative mettant en scène les problèmes qui sont à l'origine de sa souffrance. Là où l'addiction évacue le désir, l'art-thérapie tente un décalage pour l'impulser, comme déclencheur d’un processus de transformation. Passer de la créativité à l'expression du mal être, d'une manière ou d'une autre.

L'addiction comme une sorte d'acting-out constant ou résistance, où l'action par le corps est préférée au lieu de se connecter à son angoisse et à sa douleur. Cela se traduit comme une peur de mettre des mots sur cette souffrance, comme évitement à générer des éléments symboliques qui pourraient favoriser un changement psychique.

D'où l’importance d'offrir et de créer un espace où la symbolisation peut advenir doucement. Des espaces transitionnels (Winnicott) comme ateliers individuels et/ou de groupes, un espace pouvant potentiellement accueillir le conflit à l'origine de l'addiction.


Répondre à l'acting-out par la danse

Exprimer par le mouvement notre propre langage vecteur de nos pensées et de nos émotions. Trouver par la danse à symboliser l'indicible. Reprendre son corps comme support artistique sacré, se décaler de l'image qu'il avait pour le sublimer. Danser pour sentir sa présence au monde, celle du corps mais surtout celle de l'Être dans toute son entièreté, celui qui vit, respire aime et souffre. Décaler son corps pour le mettre à la place de la sublimation, pour qu'enfin il ne soit plus le souffre douleur de dépendances répétées mais qu'il soit le vecteur d'expressions créatives et révélatrices, comme mouvance symbolisante et structurante. Le corps comme la toile du peintre, centre d'un va et vient entre corps intérieur et corps extérieur dansé.





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